mardi 28 juillet 2020

Chronique récente de Charles : Au nom de la loi Dura lex, sed lex.

La loi est dure, mais c'est la loi. Je ne suis pas juriste, je n'ai jamais eu de démêlés avec la justice, rassurez vous, mais j'en ai fréquenté longtemps quelques uns professionnellement en des circonstances variées, on sent tout de suite qu'on n'a pas été formatés de la même manière, on n'a pas été coulé dans le même moule, je le dis sans a priori et sans jugement de valeur. Les événements récents, à savoir l'émergence de conseils plus ou moins avisés sur le port du masque, l'annonce d'une probable obligation, me donnent l'occasion de me souvenir de la façon qu'ont les juristes d'aborder les problèmes. D'abord faire l'état des lieux, à savoir ce que dit la loi.

La loi qui nous intéresse, elle est référencée n°2010-1192, elle date du 11 octobre 2010, et elle interdit la dissimulation du visage dans l'espace public. L'Assemblée Nationale et le Sénat l'ont votée, le Conseil Constitutionnel l'a déclarée compatible avec la Constitution, et le Président l'a alors promulguée. Comme vous le constatez, une loi, c'est du solide, c'est gravé dans le marbre, pour ainsi dire. On peut s'appuyer dessus, elle s'impose à tous, et sur tout le territoire de la République.

Vous pouvez le vérifier : cette loi dit comme ça dans son article 1 : « Nul ne peut, dans l'espace public, porter une tenue destinée à dissimuler son visage. ». L'article 2 nous précise ce qu'est l'espace public (voies publiques, lieux ouverts au public ou affectés à un service public). C'est précis, mais peut-être pas encore assez. Si j'étais juriste, j'irai chercher la jurisprudence pour déterminer par exemple si un quai de gare, un stade, une salle de spectacle sont de l'espace public ou non (accès payant, accès réservé, avec un billet ou non, gratuit, payant ou sur invitation, etc...). Mais là n'est pas mon propos aujourd'hui.

Par contre, l'alinéa 2 de cet article 2 est plus intéressant et nous rassure pour le port du masque qui nous intéresse : « L'interdiction prévue à l'article 1er ne s'applique pas si la tenue est prescrite ou autorisée par des dispositions législatives ou réglementaires, si elle est justifiée par des raisons de santé ou des motifs professionnels, ou si elle s'inscrit dans le cadre de pratiques sportives, de fêtes ou de manifestations artistiques ou traditionnelles ». On est d'accord, ça peut le faire, c'est prévu (on est aussi content pour les motards, les soudeurs, les carnavaleux,les escrimeurs et les acteurs de théâtre japonais traditionnel).

Mais ce n'est pas encore là où je veux en venir, j'en arrive directement à l'article 4 qui concerne notre questionnement : «Le fait pour toute personne d'imposer à une ou plusieurs autres personnes de dissimuler leur visage par menace, violence, contrainte, abus d'autorité ou abus de pouvoir, en raison de leur sexe, est puni d'un an d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende ».Il précise même l'aggravation des peines quand le fait est commis au préjudice d'un mineur, mais personnellement ça m'intéresse moins, ça fait malheureusement un moment que je suis majeur (à cette époque lointaine, il fallait attendre 21 ans).

Alors c'est maintenant qu'il faut sourire. Est-ce que si quelqu'un m'oblige à porter un masque en public, ce sera de la menace, de la violence, de la contrainte, de l'abus de pouvoir, de l'abus d'autorité, ou en raison de mon sexe ? Qui va décréter que c'est obligatoire de porter un masque ? Le maire, le préfet, les plus hautes autorités en parlent, suggèrent, proposent, mais aucun ne dit que c'est obligatoire (il y a des maires qui se sont déjà fait retoquer en Conseil d'Etat). Pour ma part, ça me plairait bien d'essayer d'envoyer le Premier Ministre en prison, juste pour faire appliquer la loi rigoureusement, pas par méchanceté pure, non, pour le principe, pour la beauté du débat, tout ça à cause d'une loi qui se mord un peu la queue, une loi qui n'a pas été faite pour ça, mais qui s'applique nonobstant.« Dura lex sed lex ». Je suis bien certain qu'il trouverait pour se défendre une armée de juristes plus compétents que je ne le serai jamais. Mais il a assez de problèmes en ce moment le pauvre, et il risque à juste titre de manquer d'humour. Tâchons de ne pas l'ennuyer pour des broutilles. N'empêche qu'on peut rêver en ces temps de confinement, on n'a pas grand'chose d'autre à faire (ça, ou repeindre sa porte de garage par exemple, à condition d'avoir prévu la peinture et les pinceaux avant!)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Ajoutez votre commentaire, choisissez ANONYME dans le profil, mais mettez votre prénom et initiale du nom pour vous identifier à la fin de votre texte. Merci